KINESITHERAPIE

DIAGNOSTIC D'UN RHUMATISME POLYARTICULAIRE AIGU ET CHRONIQUE

INTERET et PHYSIOPATHOLOGIE:

Sous le terme polyarticulaire, il convient de comprendre les rhumatismes oligoarticulaires qui posent des problèmes diagnostic similaires.

Cette question est essentielle en rhumatologie car de très nombreux rhumatismes débutent par une phase d'incertitude diagnostic qu'il convient d'écourter par une démarche diagnostic rigoureuse. L'apport d'un traitement optimal en est la conséquence directe.

Avant tout, il nous faut définir quelques termes:

- une oligoarthrite atteint moins de 4 articulations alors que la polyarthrite en touche au moins 4

- une évolution de moins de 3mois est selon le cas qualifiée d'aiguë ou de subaiguë, au-delà elle est chronique

Ainsi énoncés, ces rhumatismes:

- posent plus de problèmes diagnostic que les polyarthritesinflammatoires qui ne sont qu'une partie de la question mais moins que les rhumatismes monoarticulaires. Ces derniers doivent être en plus distingués des arthropathies traumatiques, des ostéoarthrites infectieuses et de certaines affections articulaires rares (tumeurssynoviales, synovite villo-nodulaire et pigmentée, chondromatose synoviale). Dans tous les cas, il convient d'éliminer une étiologie infectieuse, véritable urgence thérapeutique, avant d'envisager les autres groupes de causes.

- voient leur diagnostic dominé par la hantise d'un rhumatisme inflammatoire chronique à évolution invalidante, d'une collagénose avec atteinte viscérale grave et mise en jeu du pronostic vital, ou d'un rhumatisme articulaire aigue.

Dans cet exposé, nous respecterons 3 parties distinctes:

* les états polyarthralgiques
* les rhumatismes inflammatoires
* les rhumatismes chroniques, déformants et ankylosants

 

Conduite de l'interrogatoire, de l'examen clinique et examens paracliniques à mettre en oeuvre:

L'ensemble de l'étape clinique est primordiale car biologie et radiologie n'apportent au début que des données insuffisantes. En particulier, la clinique permet de démasquer des affections non-rhumatismales.


1) L'interrogatoire

a) antécédents

Au niveau familial, il faut savoir rechercher les antécédents de goutte ou de rhumatisme inflammatoire, en connaissant l'imprécision fréquente des réponses apportées. Les rhumatismes inflammatoires chroniques, les arthropathies métaboliques et certaines connectivites bénéficient grandement de l'apport d'antécédents familiaux.
L'âge et le sexe orientent naturellement vers certaines pathologies:

 

Age

- chondro-calcinose aiguë (CCA)
- polyarthrite oedémateuse
- pseudo-polyarthrite rhumatoïde (PPR)

Sexe Féminin: polyarthrite rhumatoïde, CCA, lupus, Gougerot...
Masculin: spondylarthrite ankylosante, arthrites réactionnelles, goutte...

 

Les antécédents personnels permettent d'orienter le diagnostic et de détecter les éventuelles contre-indications thérapeutiques liées à des affections organiques: antécédents cutanés, digestifs, rénaux, cardiovasculaire, urinaires et oculaires. Citons quelques manifestations indispensables à rechercher: psoriasis, dysenterie et rectocolite hemorragique, albuminurie, uréthrite, iritis... Il faut s'enquérir aussi d'une éventuelle infection streptococcique notamment ORL, d'épisodes articulaires semblables, des prises médicamenteuses et des voyages à l'étranger...

b) Anamnèse

- ancienneté, mode de début
- topographie initiale et chronologie des atteintes
- évolution d'un seul tenant ou par poussées, fixité ou mobilité
- existence de signes inflammatoires locaux et retentissement fonctionnel
+ retentissement sur l'état général.

c) Caractères des phénomènes douloureux

Recrudescence nocturne, notion de dérouillage matinal et durée, influence du repos et de certaines thérapeutiques.

2) L'examen clinique

a) Articulaire

Tout l'appareil ostéo-articulaire doit être palpé et mobilisé sans oublier la colonne.


Les données à préciser sont les signes inflammatoires, l'atteinte des amplitudes et l'existence de déformation

b) Général

Il est indispensable pour préciser:

- l'existence de manifestations extra-articulaires en particulier viscérales au cours d'un rhumatisme inflammatoire chronique, importantes à connaître pour l'orientation du diagnostic, du traitement et du pronostic

- à l'inverse, pour ne pas laisser passer une maladie non-rhumatismale dont les phénomènes douloureux articulaires en imposeraient pour un rhumatisme.

3) Les examens paracliniques

Les examens biologiques indispensables sont l'étude de la courbe thermique, de la VS, de la numération formule plaquette et de la protéinurie.

En cas de forte suspicion de rhumatisme inflammatoire chronique, on fait appel selon le cas à:

- l'uricémie
- l'étude du liquide synovial voire de la biopsie synoviale
- les anticorps antistreptococciques
- le Latex et Waaler-Rose
- les ACAN...

Dans tous les cas, les radiographies comparatives doivent être pratiquées en sachant que les signes radiologiques accusent un certain retard dans les étiologies inflammatoires. A défaut, elles serviront donc de référence.

 

DIAGNOSTIC :d'un état polyarthralgique:

Un étatpolyarthralgique peut être la traduction mineure de l'importe quel rhumatisme inflammatoire ou dégénératif.


Naturellement devant l'éventail de pathologies qui nous est proposé et avant d'envisager les affections articulaires, il convient d'éliminer les affections extra-articulaires.

1) Diagnostic différentiel

a) Affections osseuses douloureuses

Dans l'ostéomyélite, les ostéoses décalcifiantes bénignes et la maladie de Paget, la démarche diagnostic proposée suffit à redresser le diagnostic.

b) Hémopathies

Le cancer secondaire, le myélome multiple et les LA (leucémies aigues) imposent la pratique d'un myélogramme ou d'une biopsieosseuse.

c) Affections vasculaires

Les douleurs d'artérite et surtout d'origine variqueuse et post-phlébitique peuvent réaliser des douleurs pseudo-rhumatismales de la plante du pied.

d) Affections des parties molles

Cellulite, myosite, périarthrite.

e) Affections neurologiques

En premier lieu, il s'agit des douleurs radiculaires et des syndromes canalaires
Puis il faut envisager les douleurs cordonales, les douleurs de certaines poliomyélites aiguës ou de la sclérose en plaque.

f) Affections psychiatriques

L'on ne pourra affirmer ce type d'atteinte que devant le caractère diffusdes douleurs, l'absence de signe objectif individualisable, et lecontexte dépressif ou névrotique mis en avant par le sujet.

2) Diagnostic étiologique

a) L'interrogatoire retrouve des signes inflammatoires frustes

L'orientation diagnostique se fait naturellement vers les rhumatismes inflammatoires chroniques qui sont exposés plus loin.

b) Il n'existe pas de signes inflammatoires

* L'arthrose de la main affecte plus particulièrement la main de la femme ménopausée. Une localisation aux interphalangiennes distales (nodosités d'Heberden) et trapézo-métacarpienne est évocatrice. Il existe un piège difficile à déjouer: celui d'une affection rhumatismale débutant par un état polyarthralgique chez un arthrosique.

* Le syndrome d'hyperlaxité des sujets jeunes est surtout responsable de luxations de la rotule ou d'entorses répétées. Ce peut être plus rarement des douleurs articulaires récidivantes mais n'affectant qu'une seule articulation à la fois.

Si au terme de ces investigations, l'état polyarthralgique n'a pas révélé sa clé, il faut rassurer le patient et instituer un traitementantalgique et/ou Anti-inflammatoires non stéroidiens avec suivi régulier pour ne pas passer à côté d'une étiologie précise.

 

DIAGNOSTIC d'une polyarthrite inflammatoire chronique au stade fluxionnaire pur:

L'existence de signes articulaires objectifs réduit considérablement le diagnostic différentiel.


1) Diagnostic différentiel

Devant des signes inflammatoires, il doit éliminer une ostéoarthrite infectieuse plurifocale, une leucémie aigue ou une endocardite infectieuse.

2) Diagnostic étiologique

a) Les rhumatismes aigus et subaigus curables

Il faut individualiser les rhumatismes infectieux (rhumatisme articulaire aigue et arthrites réactionnelles) dont le déterminisme est infectieux, curables en 1 à 6mois par les anti-inflammatoires alors que leur évolution n'est pas influencée par l'antibiothérapie.

* Le rhumatisme articulaire aigue: diagnostic facile chez l'enfant devant:

- antécédents récent d'angine
- polyarthrite fugace et mobile
- signes associés cutanés et viscéraux, surtout cardiaques (intérêt de l'examen clinique répété et de l'electro-cardiogramme)
- augmentation des anticorps antistreptococciques

* Les arthrites réactionnelles

- contexte pathologique précis (brucellose, uréthrite, diarrhée infectieuse...)
- atteinte des grosses articulations des membres inférieurs
- HLAB27 dans 50% des cas
- évolution ultérieure possible vers une spondylarthrite ankylosante

* Les arthrites virales

De nombreuses viroses à la phase de début peuvent s'accompagner d'arthrites. Citons les hépatites virales, la mononucléose infectieuse, la rubéole...

* Les manifestations articulaires du purpura rhumatoïde et de l'érythèmenoeux

Les autres manifestations font le diagnostic. L'érythème noueux doit faire rechercher en priorité ses 3 grandes étiologies (primo-infection tuberculeuse, infection streptococcique et sarcoïdose dans le cadre du syndrome de Löfgren).

* La Pseudo-Polyarthrite Rhyzomélique

- sujet âgé
- atteinte des ceintures
- altération de l'état général
- VS très élevée

+ recherche d'une artérite temporale.

b) Les rhumatismes inflammatoires chroniques: prédominance de l'analyse clinique des localisations inflammatoires

* Polyarthrite rhumatoide

- femme à la ménopause
- atteinte distales des mains (surtout IPP - interphalagiennes proximales - et 2° et 3° métacarpophalangiennes), des poignets et des pieds
- atteinte fixe et symétrique
- Les critères spécifiques biologiques et radiologiques manquent souvent au début

* Spondylarthrite ankylosante

- homme jeune
- douleurs lombosacrées et talonnières
- HLAB27
- Les radiographies sacro-iliaques permettent un diagnostic précoce

* Rhumatisme psoriasique

- différentes formes de début, mais réalisant à la phase d'état une association variable de polyarthrite rhumatoide et de spondylarthrite ankylosante
- psoriasis

c) Les collagénoses

On y pensera particulièrement devant une diffusion cutanée ou viscérale.


* lupus erythémateux disséminé+++

- érythème du visage
- existence d'une albuminurie, d'une péricardite
- présence d'ACAN et d'anticorps anti-DNA

* Sclérodermie

- syndrome CRST (calcinose sous-cutanée, Raynaud, sclérodactylie, télangiectasies du visage)
- atteinte motrice oesophagienne

* Autres

périartérite noueuse, polymyosite et dermatomyosite

d) Les arthropathies métaboliques

Elles ne font pas partie des rhumatismes mais posent des problèmes diagnostic comparables. Le pronostic en est cependant tout différent du fait de leur sensibilité thérapeutique.


* La goutte: la forme polyarticulaire

- terrain particulier
- crise du gros orteil dans les antécédents
- hyperuricémie
- sensibilité à la colchicine

* La chondrocalcinose articulaire: la forme polyarticulaire

- uricémie normale
- cristaux de pyrophosphate de calcium dans le liquide synovial
- calcifications radiologiques de siège précis

* Exceptionnellement, l'hémochromatose

- autres manifestations cliniques
- bilan ferrique

 

DIAGNOSTIC d'un rhumatisme inflammatoire chronique au stade des déformations et ankyloses: cas le plus simple:

1) Diagnostic différentiel

a) Ostéoarthropathie hypertrophiante pneumique de Pierre Marie

- hippocratisme digital
- hypertrophie en 'baguettes de tambour'
- périostose engainante sur les radiographies
+ rechercher une pathologie pulmonaire, en particulier un cancer bronchopulmonaire primitif

b) Algodystrophie

- syndrome épaule/main
- blocage de l'épaule
- atteinte de la main: oedème, cyanose...
- absence de syndrome inflammatoire
- ostéoporose radiologique sans atteinte des interlignes

2) Diagnostic étiologique

a) L'arthrose

b) Polyarthrite rhumatoide

- déformations des doigts en 'coup de vent', carpite...
- positivité du Latex et Waaler-Rose

c) Rhumatisme psoriasique

d) La goutte chronique tophacée

- antécédents de crises, hyperuricémie
- tophus sous-cutané caractéristiques
- géodes radiologiques témoignant de tophus articulaires, et si besoinbiopsie d'un tophus sous-cutané.

CONCLUSION:

Ainsi le diagnostic d'un rhumatisme polyarticulaire devient d'autant plus facile que celui-ci est plus ancien et évolué. Il est cependant évident qu'en dépit des difficultés, c'est au stade initial qu'il faut le reconnaître car c'est le meilleur moyen de le traiter efficacement. Dans les premiers moments d'évolution, le problème principal est d'éliminer une arthrite septique.







10/04/2011
0 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 73 autres membres