COMA
DEFINITION
Abolition de la conscience et de la vigilance insensible aux épreuves de stimulation.
INTERET
Tout coma constitue une urgence médicale, parfois chirurgicale. Après avoir rapidement apprécié la gravité, le tout est d'attribuer une étiologie à ce coma en se fiant d'abord à la clinique.
La distinction entre étiologies traumatiques et non-traumatiques est justifiée par le fait que le diagnostic est évident dans un cas, alors qu'il l'est beaucoup moins dans l'autre.
PHYSIOPATHOLOGIE
Le coma est avant tout un trouble de la vigilance, état d'activation cérébrale correspondant à l'état de veille comportementale
La formation réticulée activatrice ascendante (FRAA) a un rôle essentiel dans la vigilance par une activation sous-corticale ascendante vers le cortex. C'est cette structure qui est impliquée dans tous les coma.
La conscience est la connaissance de soi-même et de l'environnement. C'est un état d'activation corticale indispensable à laperceptivité et aux phénomènes cognitifs.
Le dysfonctionnement du FRAA est du, soit à une lésion cérébrale focale, soit plus souvent à une souffrance cérébrale diffuse de diverses origines.
CONDUITE A TENIR devant un coma
1) Les coma traumatiques
Tout coma traumatique (classique séquence traumatisme cranien puis perte de connaissance, avec ou sans intervalle libre, avec ou sans signes neurologiques) constitue une urgence neurochirurgicale, et impose une fois les fonctions vitales assurées la réalisation d'un scanner cérébral et le transfert immédiat en milieu neurochirurgical.
Les troubles de conscience traduisent un début d'engagement.
2) Les coma non-traumatiques
a) Appréciation des grandes fonctions vitales et mesures thérapeutiques immédiates
* Appréciation de l'état respiratoire: liberté des voies aériennes, oxygénothérapie éventuellement par intubation/ventilation
* Appréciation de l'état cardiovasculaire: traitement immédiat d'un éventuel collapsus, scope.
* Prise de température
* Correction d'une éventuelle hypoglycémie, d'une hypovitaminose B1à la dose de 1g/j (encéphalopathie de Gayet-Wernicke), traitement antiépileptique en cas de convulsion par diazépam (Valium) ou clonazépam (Rivotril), administrer un antidote spécifique comme le flumazénil ou le naloxone. Toutes ses mesures sont à prendre si la suspicion clinique est assez forte.
Certaines manifestations peuvent être en rapport avec le dérèglement des fonctions végétatives (rythme respiratoire, collapsus et hypertension artérielle, hypo- ou hyperthermie ...).
b) Examens complémentaires systématiques
numération formule plaquette/VS, TP/TCA, groupage,ionogramme sanguin et urinaire/glycémie/calcémie/urée/créatinine
bandelette, radiographie pulmonaire, gaz du sang, hémocultures en cas de fièvre
alcoolémie et recherche de toxiques dans le sang, les urines et le liquide d'aspiration.
c) Anamnèse: essentielle pour l'orientation diagnostique
Notion d'un traumatisme cranien.
Les circonstances de survenue, le mode d'installation et les éventuelsSignes fonctionnels précessifs (céphalées, déficit focalisé, infection...).
+ Les antécédents en particulier cardiovasculaires et traitement en cours.
d) L'examen général est orienté par les grands groupes étiologiques et recherche ...
... les signes de traumatisme cranien, de syndrome infectieux
... des signes d'intoxication (odeur de l'haleine, piqûres du toxicomane...) ou d'affection systémique ou endocrinienne.
e) Examen neurologique: rapide, il doit être systématique et rigoureux
* Recherche prudente en cas de suspicion de traumatisme cranien d'unsyndrome méningé
* L'étude la motricité passe, chez un patient comateux, par l'étude de la réactivité à la douleur, les réactions d'éveil et d'orientation, la recherche d'une paralysie faciale.
Les réactions appropriées de retrait et d'évitement indiquent une conservation des voies sensitivo-motrice, l'abolition unilatérale indique une hémiplégie par interruption de la voie cortico-spinale, l'abolition bilatérale des lésions bilatérales.
Les réactions inappropriées, lentes, stéréotypées et sans finalité apparente, se font en:
- décortication par souffrance hémisphérique étendue(flexion/adduction des membres supérieurs, extension des membres inférieurs).
- décérébration par souffrance interne de la partie haute du tronc cérébral (extension/adduction/ rotation interne en un mouvement d'enroulement des membres supérieurs, et extension des membres inférieurs).
* L'étude du tonus musculaire rapporte:
- une hypotonie latéralisée dans les hémiplégies
- une hypotonie généralisée évocatrice de certains diagnostic (comas toxiques et métaboliques) mais peut aussi simplement témoigner de la profondeur du coma
- une hypertonie extrapyramidale dans l'encéphalopathie hépatique, les intoxications au CO (monoxyde de carbone) et aux neuroleptiques
* Observation de mouvements anormaux comme des clonies, un astérixis ou des myoclonies disséminées.
* Etude des réflexes ostéo-tendineux.
* L'analyse de la respiration peut apporter des informations essentielles:
|
description |
localisation de la souffrance |
dyspnée de Cheynes-Stokes |
mouvements respiratoires qui s'amplifient progressivement jusqu'à un maximum qui aboutit à une apnée |
diencéphalique oumésencéphalique supérieure |
hyperventilationneurogène centrale |
polypnée ample, rapide, régulière |
mésencéphaliqueou protubérantielle haute |
dyspnée de Küssmaul |
id: les gaz du sang font la différence |
|
respiration apneustique |
pause respiratoire après chaque inspiration, parfois même après expiration |
protubérantielle basse |
respirationataxique et gasps |
respiration irrégulière et anarchique: l'arrêt respiratoire peut survenir à chaque instant |
bulbaire |
* L'examen des yeux est le temps fort de l'examen neurologique:
- une résistance à l'ouverture palpébrale évoque un blépharospasme ou une conversion hystérique
- le clignement spontané implique l'intégrité de la FRAA, le clignement à un stimulus lumineux ou sonore l'intégrité des voies afférentes sensorielles, le clignement à la menace un certain degré d'activité corticale
- le réflexe cornéen est un clignement et une élévation du globe. Il met en jeu le trijumeau et ses connexions avec le VII et le III.
- la pupille et le réflexe photomoteur.
mydriase unilatérale aréactive |
engagement temporal imminent |
pupille intermédiaire ou en mydriase modérée aréactive |
lésion mésencéphalique |
mydriase bilatérale aréactive |
lésions étendues irréversibles ou intoxication à l'atropine |
myosis réactif |
lésion diencéphalique ou toxique |
myosis punctiforme réactif |
lésion protubérantielle et intoxication aux opiacés |
- la position des globes oculaires:
perte de parallélisme horizontal signant une atteinte des NOC III et VI
déviation conjuguée des yeux vers l'hémiplégie quand la lésion est protubérantielle, controlatérale à l'hémiplégie quand la lésion est hémisphérique
déviation oblique des yeux dans les lésions du tronc cérébral
déviation en bas et en dedans dans les lésions thalamiques.
- les mouvements spontanés des globes: l'errance oculaire signifie l'intégrité de la protubérance et des NOC, le boobing oculaire ou succession irrégulière d'abaissements rapides suivis d'une remontée plus lente une atteinte protubérantielle.
- les réflexes oculocéphalogyres quand présents signent l'intégrité du tronc cérébral: le réflexe oculocéphalique est le phénomène des 'yeux de poupée', le réflexe oculovestibulaire par stimulation à l'eau froide se manifeste par la déviation lente et tonique des yeux vers le côté stimulé.
* Le fond d'oeil sans mydriatique recherche un oedème témoignant alors d'une hypertension intra-cranienne.
A terme, le coma est classé:
- en stades I (vigil), II (léger et réactif), III (aréactif) et IV (dépassé: plusieurs EEG plats sans intoxication)
- plus souvent selon l'échelle de Glasgow (E4, M6, V5)
f) Examens complémentaires urgents selon l'orientation étiologique
Scanner en cas de traumatisme cranien ou de cause du coma indéterminée
Radiographies du rachis en cas de traumatisme complétant le scanner cérébral
ponction lombaire après scanner dans tous les coma fébriles. Le patient séropositif constitue un cas tout à fait particulier.
Selon les éléments de suspicion clinique: dosage de CO, frottis sanguin et goutte épaisse, dosages hormonaux...
L'EEG montre un ralentissement diffus, les ondes a sont remplacées par des ondes d, il y a peu ou pas de réactions aux divers stimuli. Cependant, l'intérêt diagnostic est grand dans certaines étiologies spécifiques, comme les encéphalopathies herpétique, hépatique, toxique ou métabolique, et évidemment l'épilepsie.
g) Attitude thérapeutique en réanimation sous surveillance stricte, en particulier neurologique
Le traitement symptomatique maintient les fonctions vitales et prévient les complications du décubitus:
- apports hydroélectrolytiques adaptés aux ionogrammes
- apports Vitaminiques (B1, B6, PP), de phosphore et folates quotidiens
- ventilation assistée et ses contraintes
- alimentation par sonde naso-gastrique ou parentérale de 2 000Cal/j au minimum
- nursing et kinésithérapie
- soins et occlusion des yeux
- HBPM
Le traitement étiologique dépend bien évidemment de la cause du coma.
DIAGNOSTIC différentiel:
1) Locked-in syndrom ou syndrome de déafférentation motrice
Ce n'est pas un coma car vigilance et conscience sont respectées. Les seuls mouvements permis sont l'ouverture et les mouvements verticaux des yeux. Les lésions siègent au pied de la protubérance de façon bilatérale, la FRAA et les hémisphères étant intacts.
2) Mutisme akinétique des lésions frontales bilatérales (territoire cérébral antérieur) et des hydrocéphalies aiguës
Présents |
Absents |
coma vigil avec respect du cycle veille/sommeil |
mouvements, quelque soit le stimulus |
3) Syndrome de conversion hystérique
Importance de la résistance à l'ouverture des yeux, pas toujours spécifique cependant. L'évitement du bras levé est plus fiable.
4) Hypersomnies du syndrome de Gélineau, de Pickwick et d'apnée du sommeil
Au réveil, la conscience est immédiatement restaurée.
DIAGNOSTIC étiologique
Devant un coma, il faut toujours savoir évoquer de causes multiples intriquées:
- intoxication alcoolique aigue et médicament
- intoxication alcoolique aigue et hypoglycémie
- intoxication alcoolique aigue et traumatisme cranien
- méningoencéphalite et hyponatrémie
1) Causes traumatiques: hématome extra-dural, hématome sous dural
Le diagnostic peut être moins évident chez le vieillard et l'éthylique qui méconnaissent souvent le traumatisme cranien, ou quand existe unintervalle libre prolongé.
Dans certains cas, il est difficile de dire si le traumatisme cranien a précédé le coma ou l'inverse. Sur certains terrains, une complication hémorragique peut survenir pour des traumatismes mêmes minimes(éthylique, sujet âgé, trouble de l'hémostase ou anticoagulants).
2) Causes métaboliques et carentielles: de la confusion au coma profond progressivement, elles doivent être rapidement détectées car accessibles à un traitement rapidement efficace
Les manifestations motrices sont souvent présentes avec au maximum convulsions. Il n'y a pas de signes déficitaires focaux, les réponses pupillaires sont conservées.
a) Hypoglycémie: sueurs abondantes et babinski bilatéral ± convulsions
b) Hypo- et anoxie cérébrale, quelque soit sa cause
c) Troubles ioniques: hyper- ou déshydratations majeures, hyper- et hyponatrémie, hypercalcémie
d) Hypothermie profonde, au maximum état de mort apparente
e) Encéphalopathie de Gayet-Wernicke
f) Encéphalopathie hépatique: astérixis, myoclonies, hypertonie extrapyramidale. Doit faire chercher un facteur déclenchant.
g) Encéphalopathie de l'insuffisance rénale chronique évoluée
* Encéphalopathie urémique avec manifestations motrices et crisescomitiales
* Encéphalopathie des hémodialysés par intoxication aluminique
h) Encéphalopathie respiratoire par conjonction de l'hypoxie/hypercapnie. Doit faire chercher un facteur déclenchant.
i) Endocrinopathies
* Complications métaboliques aiguës du diabète
* insuffisance surrénalienne aigue
* Coma hypothyroïdien
* Coma hypopituitarien
* Coma de l'hyperparathyroïdie par le biais de l'hypercalcémie
3) Causes toxiques
a) intoxication alcoolique aigue: ne pas méconnaître une autre cause!!
b) Intoxications médicamenteuse: importance des recherches de toxiques
Barbituriques et benzodiazépines: coma calme
Anti-dépresseurs tricycliques: risque de trouble du rythme à partir d'une dose de 10mg/kg
Lithium: risque de troubles cardiovasculaires
Anticholinergiques: pupilles dilatées aréactives.
c) Surdosage en opiacés ou overdose: myosis serré bilatéral
d) Intoxications accidentelles
CO: les signes cutanés sont inconstants. Le dosage de la carboxyhémoglobine fait le diagnostic. Le pronostic dépend de la précocité de l'oxygénothérapie éventuellement hyperbare.
Organophosphorés: myosis serré bilatéral.
4) Causes vasculaires: installation brutale ou rapide de signes neurologiques focalisés
hépatomégalie/hémorragie intracérébrale/ischémie
Encéphalopathie hypertensive de l'hypertension artérielle maligne/thrombophlébite cérébrale.
5) Causes infectieuses: importance de la ponction lombaire
méningoencéphalite: virale (herpétique), bactérienne, parasitaire (neuropaludisme).
Abcès cérébral compressif (cf ci-dessous).
6) Processus expansifs
Tumeurs cérébrales avec engagement.
hématome sous dural chronique.
7) Origine comitiale
Post-critique: la confusion habituelle peut aller jusqu'au coma avec hyperpnée et babinski
Etat de mal infraclinique: en effet, les crises peuvent êtreasymptomatiques et se résumer au coma. L'EEG fait le diagnostic.
A découvrir aussi
Inscrivez-vous au blog
Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour
Rejoignez les 77 autres membres